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L’ENNEMI DES FEMMES

— interrompit Diogène, — lui qui a fait de Jaroslaw un garçon de ferme.

— Jaroslaw n’était qu’un faux poète, et je ne défends pas les femmes qui demandent à l’esprit, non l’émancipation de leur intelligence, mais celui de leur conduite et de leurs sens. On se moque souvent des femmes auteurs ; il faut se moquer ou plutôt s’indigner seulement de celles qui n’écrivent, à tort et à travers, que pour agir à tort et à travers, mais celles-là, même, sont souvent encore vos victimes. La femme à la mode, la coquette, toutes celles que la flatterie égare, entraîne, enivre, sont les produits de votre domination louangeuse, corruptrice. À quelle heure, à quelle minute de l’amour, ou du ménage, avez-vous reconnu à la femme ses titres pour une autre destinée que celle du plaisir et du devoir domestique ?

— Comme tu es devenue savante ! dit Diogène avec un enthousiasme légèrement ironique.

— C’est que j’ai beaucoup souffert, Diogène.

Ce jour-là, l’entretien fut rompu. Kamenowitch cédait peu à peu au charme de sa femme ; mais il voulait bien donner un démenti à ses théories, sans les renier.

Un incident tout naturel détermina une crise qui put faire mesurer à Nadège et à Diogène le chemin fait déjà au devant l’un de l’autre, et celui qui leur restait encore à faire.

Le médecin déclara un matin que Diogène pouvait quitter sans danger la maison du brave