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L’ENNEMI DES FEMMES

— Vraiment ! vous vous intéressez donc à moi ?

— Oui, à vous, à la justice et à la vérité aussi.

— Oh ! la justice voudrait peut-être que la blessure fût mortelle ! Quant à la vérité, je ne vois pas ce qu’elle gagnerait à ma guérison.

— La justice a voulu que vous fussiez frappé, — reprit gravement le fermier qui aimait à pontifier, — et la vérité attend de vous que vous la confessiez publiquement.

— Quelle vérité ?

— Celle qui affirme que la femme est la vertu de l’homme, que l’homme qui est l’ennemi des femmes est l’ennemi de sa conscience.

— Ah ! vous croyez que, quand je serai guéri, j’irai proclamer cela.

— Je le crois.

Diogène ne répliqua pas ; il feignit de s’assoupir, mais il rêvait, il réfléchissait. Au bout d’une heure, il dit à Gaskine :

— J’avais toujours projeté de vous rendre une visite ; mais je ne m’attendais pas à m’introduire chez vous de cette façon encombrante.

— Moi, je vous attendais.

— Vraiment ? vous êtes donc sorcier ?

— Non, mais je pensais que ce qui est arrivé arriverait. Un homme d’esprit ne peut sortir d’une position ridicule que par une soumission toute simple ou par un grand désespoir.

Diogène regarda le paysan avec un étonnement profond.