Page:Sacher-Masoch - L’Ennemi des femmes, 1879.djvu/266

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
256
L’ENNEMI DES FEMMES

Elle observa, par elle-même, toute la soirée, Diogène, qui, au premier rang des spectateurs, riait, gesticulait, applaudissait à outrance, toutes les fois que la fameuse actrice était en scène et semblait vouloir corroborer ainsi les bruits qui circulaient.

— Le malheureux ! pensa Nadège, avec une pitié profonde, est-ce qu’il devient fou ?

Le lendemain, elle retourna au spectacle, se plaça dans une loge apparente. Diogène feignit de ne pas la voir ; mais la malignité des regards de tous les spectateurs établissait entre les deux époux, je veux dire entre les deux adversaires, une communication fatale, nécessaire, et, en dépit de sa résolution, Diogène ne put s’empêcher, vers le milieu de la soirée, de céder à l’attraction.

Il regarda Nadège. Les éclairs de leurs yeux se heurtèrent et dégagèrent une étincelle. Diogène voulut sourire, mais fit une grimace, et étant sorti de la salle, dans un entr’acte, il ne revint plus à sa place.

Le major accompagnait Nadège. Le public ne savait pas, relativement au beau Casimir, ce qui s’était passé dans le Palais de bois de la place, et comme on ignorait que ce don Juan fût à la veille de devenir un mari correct, on supposait qu’il galantisait auprès de madame Ossokhine. Je dois ajouter qu’on était loin de le blâmer et de blâmer Nadège.

Deux jours après, Diogène, qui s’était subite-