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L’ENNEMI DES FEMMES

fiancé, qu’elle entoura de ses deux bras, lui disant, entre deux baisers, avec un rire vibrant comme une chanson d’oiseau :

— Il n’était pas chargé !

Constantin s’était-il douté de la supercherie ? Il dissimula, en tout cas, sa joie de vivre, sa confusion d’avoir été dupe ou sa fatuité d’être tombé volontairement dans un piège prévu, et serrant avec force Petrowna contre sa poitrine :

— Vous vouliez donc vous moquer de moi ? lui dit-il.

— Je voulais savoir si vous étiez capable d’autant de folie que moi.

— Eh bien, maintenant, êtes-vous satisfaite ?

— Oui, vous êtes le fou que j’aime : aussi, je suis à vous.

— Pour toujours ?

— Je vous le jure !

Constantin fut assez spirituel, assez maître de lui, pour résister à la tentation de déclarer que cette épreuve singulière était inutile. S’appuyant au bras de Petrowna, il sortit avec elle de sa prison souterraine et rejoignit le vieux Gaskine, qui attendait avec solennité, en fumant sa pipe, dans son petit salon, l’effet de sa rigueur et de sa sagesse.

— Hurrah ! — cria-t-il, quand il vit entrer le couple amoureux. — Je disais bien que j’avais pris le meilleur moyen.

Constantin se garda bien de contredire le vieux fermier, mais au dedans de lui il songeait que le