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L’ENNEMI DES FEMMES

pistolet au poing, forcé un amant infidèle à l’épouser. Le mariage s’était célébré à Cracovie avec un grand éclat, puis les deux époux étaient partis pour la France.

Mais aux dernières nouvelles, on assurait, et Diogène Kamenowitch avait été le premier à certifier le fait, que le climat de la France et le séjour de Paris avaient singulièrement modifié les dispositions réciproques des deux époux. La femme plaidait en séparation, et le mari, marié par force, se trouvait si heureux de son esclavage, qu’il se révoltait uniquement pour obliger son tyran à le maintenir sous le joug.

Constantin eut le loisir de songer à cette histoire, ainsi qu’à quelques autres qui avaient défrayé la chronique du cercle, pendant la longue nuit qu’il passa dans le carcere duro du père Gaskine.

Il est juste de dire qu’on lui avait délié les bras, dressé un lit, servi un souper, dont un prisonnier d’État se fût à coup sûr contenté, et, qu’à part la liberté, il pouvait tout demander à l’équité du vieux Gaskine. Celui-ci poussa même la condescendance jusqu’à lui envoyer une pipe et du tabac.

La matinée du lendemain était déjà assez avancée, quand Constantin entendit ouvrir la porte de sa prison. Gaskine parut, précédant Petrowna.

La contenance de la jeune fille dérouta absolument les prévisions du prisonnier. Il s’était attendu, ou à une soumission charmante, ou à une révolte altière. Petrowna entra simplement, grave, re-