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L’ENNEMI DES FEMMES

fuir, ne pourriez-vous pas m’accorder une hospitalité moins incommode ?

Gaskine réfléchit.

— Quelle parole d’honneur me donnerez-vous ? dit-il d’une voix moqueuse, celle qui a déjà servi à Petrowna ? On va vous apporter à souper, vous dresser un lit ; on vous déliera les bras. Résignez vous à passer la nuit de cette façon ; demain, nous verrons.

Gaskine salua, se retira, et Constantin entendit qu’il fermait soigneusement la porte au dehors.

L’aventure était ridicule et, avec un vieil entêté comme Gaskine, pouvait être tragique.

Constantin prit le seul parti qu’il pût prendre, celui de se résigner, remettant à plus tard les effets d’un dépit qu’il ressentait vivement.

Il n’était pas fâché, d’ailleurs, en subissant cette folle épreuve, d’en faire aussi une contre-épreuve du caractère de Petrowna.

Si cette jeune étourdie ratifiait les violences de Gaskine et si elle n’était pas toute confuse du procédé de celui-ci pour lui assurer un mari, Constantin, dût-il se faire tuer, hacher en morceaux, se guérirait de son amour et ne donnerait jamais son nom à une si maladroite imitatrice de Nadège.

Pauvre Constantin ! Il ignorait deux choses : la première, c’est qu’on ne peut pas plus se guérir volontairement de l’amour qu’on ne se guérit d’une vraie maladie de poitrine. Les poitrinaires qui croient échapper à la fatalité de la phtisie se sont