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L’ENNEMI DES FEMMES

quand Petrowna lui aurait manifesté par un mot, par un signe, qu’elle désirait le revoir.

Petrowna se révolta contre cette prétention, et jura qu’elle aimait mieux renoncer pour toujours à Constantin que de subir ses exigences.

— Enfant ! — lui dit Nadège. — Fort heureusement vous avez des années de printemps à gaspiller.

Laissant les deux amoureux à leur colère, ajournant leur réconciliation qu’elle croyait infaillible, sinon plus qu’à moitié faite, elle alla porter ailleurs, dans la ville, le secours de sa bonté et de sa raison.

Elle constata de grands ravages. Les doctrines dissolvantes de Diogène s’étaient infiltrées dans bien des familles. Mais elle redoubla d’éloquence, de zèle, d’amitié, et bientôt elle put songer uniquement à la lutte définitive, ouverte, loyale, qu’elle avait promise et qu’elle voulait engager contre Diogène.

Avant d’aborder cet épisode dramatique et de laisser seuls en présence ces deux adversaires dignes de se combattre, il faut dire en deux mots comment Nadège conquit le major.

Nadège avait appris que le beau Casimir, tourmenté par ses créanciers, que fomentait peut-être Constantin, se désespérait de ne pouvoir prétendre à la main de Petrowna. Un jour qu’elle recevait sa visite et ses plaintes, Nadège lui dit :

— Pourquoi ne vous déclarez-vous pas ?

— Croyez-vous que j’aie des chances ?