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L’ENNEMI DES FEMMES

Madame Pirowska sourit involontairement avec plus de douceur qu’elle n’eût voulu en mettre dans son sourire, si Nadège n’avait pas été là.

— Relevez-vous, dit-elle à son mari.

— Aidez-moi ! dit le pauvre homme, dont les genoux étaient raidis.

— Vous voyez bien que vous ne pouvez pas vous passer de moi ? reprit madame Pirowski, en riant tout à fait.

Cette réconciliation avait été une victoire facile pour madame Ossokhine. Il avait suffi qu’elle montrât son beau visage, ses yeux éclairés d’une flamme paisible, qu’elle dît quelques mots avec ce charme tout-puissant de l’honnêteté qui s’épanche.

La seconde œuvre, un peu plus délicate, était le bonheur de Léopoldine. Quand je dis que l’œuvre était plus délicate, j’entends pour la conscience de Nadège ; car l’indolence de la jeune fille, plus froissée dans son amour-propre que dans son amour, rendait la tâche de la consoler et de la sauver plus facile.

Madame Ossokhine, après une demi-heure d’entretien, savait à quoi s’en tenir. Léopoldine avait la vocation du mariage, mais sans avoir celle de l’amour dans le mariage. Elle tenait à l’étiquette décente, à la tenue d’un mari, beaucoup plus qu’aux qualités brillantes ou profondes.

Madame Ossokhine pensa que le major était le mari convenable pour Léopoldine, et ce mariage qui consacrerait la réconciliation de M. Pirowski avec