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L’ENNEMI DES FEMMES

Melbachowski, devenu railleur, affectait de braver les préjugés, en venant rendre visite aux amies de madame Ossokhine et se refroidissait considérablement à son égard.

Il faut se rappeler que Melbachowski était un ami, un adepte de Diogène ; qu’il avait eu, en quelque sorte, une permission du philosophe, pour venir flirter, selon le mot anglais, dans l’intérieur Pirowski ; que son goût pour Léopoldine ne s’était jamais élevé au delà d’une affabilité banale ; qu’il eût trop exigé pour se déclarer véritablement épris, et que les théories desséchantes de Diogène avaient une prise facile sur son esprit présomptueux.

Petrowna partagea, avec une vivacité qui dépassait la mesure de son amitié de sœur, le dépit de Léopoldine. N’osant s’irriter contre Constantin, qui la négligeait, elle s’irrita contre Melbachowski ; et ne voulant faire aucune avance à l’ingrat fonctionnaire du cercle qui semblait mettre tant de précautions dans son amour, elle fit pour le compte de Léopoldine la coquette avec Melbachowski, en essayant contre Constantin la plus téméraire, la plus dangereuse entreprise qu’elle pût imaginer.

L’hiver était dans son plein. On organisa dans la ville une grande partie de traîneaux. Il s’agissait de courses à volonté dans les prairies couvertes de neige : c’était un prétexte aux élégantes toilettes.

— Nous irons, dit Petrowna à sa sœur.

Madame Pirowska, qui prenait son veuvage au