— Moi, dit nonchalamment madame Pirowska à cette interrogation muette, je trouve que le major serait un mari modèle.
— Il fallait vous dire cela, il y a vingt-cinq ans, madame.
Madame Pirowska trahit un vague étonnement. Son mari, son esclave fidèle essayait-il donc de secouer sa chaîne ?
Léopoldine se mit à rire.
— Ne dirait-on pas que papa est jaloux du major ?
Madame Pirowska haussa les épaules, déclarant qu’elle ne savait rien.
Il était tard ; les deux sœurs se retirèrent ; leur mère, demeurée seule, allait se lever de son divan pour en faire autant, quand M. Pirowski rentra brusquement, une liasse de papiers à la main. C’était le dossier des dénonciations anonymes. Il le jeta sur les genoux de sa femme.
— Que répondrez-vous à cela, madame ?
L’imposante madame Pirowska parcourut d’un air de dédain ces réquisitoires officieux, et répondit ce qui est la réponse fatale en pareil cas :
— Vous croyez des lettres sans signatures ?
— Évidemment celui qui m’écrit est un méchant homme ; mais il a bien l’air de me servir la vérité.
— C’est un méchant qui vous a pris pour un fou.
— Les détails qu’il donne sont précis, nombreux.
Madame Pirowska se leva majestueusement :