Page:Sacher-Masoch - L’Ennemi des femmes, 1879.djvu/188

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
178
L’ENNEMI DES FEMMES

— Moi, dit nonchalamment madame Pirowska à cette interrogation muette, je trouve que le major serait un mari modèle.

— Il fallait vous dire cela, il y a vingt-cinq ans, madame.

Madame Pirowska trahit un vague étonnement. Son mari, son esclave fidèle essayait-il donc de secouer sa chaîne ?

Léopoldine se mit à rire.

— Ne dirait-on pas que papa est jaloux du major ?

Madame Pirowska haussa les épaules, déclarant qu’elle ne savait rien.

Il était tard ; les deux sœurs se retirèrent ; leur mère, demeurée seule, allait se lever de son divan pour en faire autant, quand M. Pirowski rentra brusquement, une liasse de papiers à la main. C’était le dossier des dénonciations anonymes. Il le jeta sur les genoux de sa femme.

— Que répondrez-vous à cela, madame ?

L’imposante madame Pirowska parcourut d’un air de dédain ces réquisitoires officieux, et répondit ce qui est la réponse fatale en pareil cas :

— Vous croyez des lettres sans signatures ?

— Évidemment celui qui m’écrit est un méchant homme ; mais il a bien l’air de me servir la vérité.

— C’est un méchant qui vous a pris pour un fou.

— Les détails qu’il donne sont précis, nombreux.

Madame Pirowska se leva majestueusement :