Page:Sacher-Masoch - L’Ennemi des femmes, 1879.djvu/167

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
157
L’ENNEMI DES FEMMES

kine était un grand ami de Nadège. Elle était, en toute occasion, disposée à avoir pour lui beaucoup d’égards. Mais, sa façon de répondre, sa façon de s’installer, en bourrant sa pipe, offensaient trop les convenances autant que la fierté de la rédaction, pour qu’elle ne répliquât pas d’une voix aigre :

— C’est vous qui êtes chargé de nous donner des conseils ?

Gaskine était occupé à battre le briquet ; il alluma sa pipe, en tira plusieurs bouffées, et quand il se fut assuré que le feu sacré ne courait pas le risque de s’éteindre, il dit simplement :

— C’est moi !

L’assurance avec laquelle Gaskine avait lancé ce mot, entre deux bouffées, était singulièrement impertinente, comique ou menaçante. Mademoiselle Scharow, qui réservait, sans doute pour ses relations intimes l’aigreur qu’elle mitigeait si précautionneusement dans ses relations avec le pouvoir, eut une suffocation de colère, qu’elle mit sur le compte d’une suffocation de tabac.

— Nous ne sommes pas ici à l’estaminet ! monsieur Gaskine, dit-elle en pinçant son nez par un geste superflu.

— Bon ! bon ! vous vous y habituerez avec le temps ! répliqua Gaskine en entrecoupant chaque mot par une aspiration énergique, car je ne bougerai plus d’ici !

Jaroslaw fit un mouvement de surprise et allait pousser une exclamation. Son père le prévint :