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L’ENNEMI DES FEMMES

— Non ; mais elle est l’amie de madame Ossokhine, et c’est la même chose.

— Ah ! repartit le philosophe, qui réprima un tressaillement nerveux de la bouche, c’est bien généreux à elle de vous avoir mis une si belle créature entre les bras !

— Dites : sur les bras ! c’est trop de générosité ! s’écria Constantin qui riait aux éclats.

— Avec un amoureux moins loyal que vous, continua Diogène, c’eût été fort imprudent. Je m’imagine que, sans vous en douter, vous avez subi une épreuve.

— C’est possible !

— Une double épreuve, physique et morale !

Constantin rougit, sourit, et garda le silence.

— Seulement, se hâta d’ajouter Diogène, que ce silence semblait contredire, si l’Arméniene s’est aperçue qu’elle vous a lassé, elle aura peut-être une fâcheuse opinion de la jeunesse galicienne, et peut-être bien qu’on se moque de vous là-bas.

— Je ne crois pas ! dit Constantin, en saluant le philosophe et en rentrant dans le bal, avec la pétulance distraite d’un danseur qui n’est pas venu pour philosopher.

Diogène décidément n’était plus en verve.

Petrowna était adossée au chambranle d’une des grandes portes du salon, vis-à-vis du fumoir. Elle avait vu sortir, elle vit rentrer Constantin, du même air sérieux qui cachait un sourire, comme ces ciels voilés derrière lesquels on sent le soleil.