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L’ENNEMI DES FEMMES

Une acclamation unanime, un hourrah formidable retentit.

— Jaroslaw, dit madame Ossokhine avec un sourire à demi sérieux, vos amis se compromettent. Si l’on savait que vous recevez ainsi un écrivain de l’opposition !…

Qui le saura ?

— Je veux qu’on le sache, interrompit Gaskine. N’est-ce pas, vous autres, que vous êtes prêts à tout endurer pour l’honneur de Nadège Ossokhine, et pour la Vérité ?

— Oui, oui, s’écria la foule, qui était en général toujours de l’avis de Gaskine, et à qui le chantre avait fait la leçon.

— Mes amis, dit Nadège avec douceur, mais avec cette solennité que le triomphateur le plus simple ne peut réprimer en lui quand il s’enivre de l’émotion qu’il cause, j’espère ne vous exposer jamais à aucun péril. Je défends votre bonheur. Je prêche l’union des hommes de cœur avec les femmes dévouées ; l’émulation aux ignorants pour qu’ils apprennent, la soumission aux savants pour qu’ils enseignent ; je n’excite aucune haine ; je ne veux aucun désordre ; je vous exhorte à travailler avec moi à la paix et à la concorde, en servant la justice et la vérité. Il n’y a rien là de séditieux.

— Peut-être ! dit Gaskine, en hochant la tête. Mais si jamais on osait vous menacer, je vous l’ai dit et je le répète, nous serions là tous pour protester… On aurait peur. Seulement, je souhaite pour