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L’ENNEMI DES FEMMES

qui ne comprenait pas qu’une créature pareille se contentât de si peu.

L’inspection de la ferme, de toutes les écuries, du verger, suivit le repas, et, après l’inspection, on causa de la vie nouvelle de Jaroslaw.

— N’avez-vous pas dit, monsieur Gaskine, le jour où vous avez rencontré votre fils chez moi, — demanda Nadège en traversant un petit jardin devant la ferme — que ce grand enfant prodigue avait laissé ici quelqu’un… qui l’attendait.

— Oui, panna Nadège.

— Ne puis-je la voir ?

— Elle est là ; mais elle n’ose se montrer.

— Comment ! elle se cache ? de qui a-t-elle peur ? de moi ou de Jaroslaw ?

— Peut-être de tous les deux, répondit le fermier avec un gros rire de contentement.

— Pour ma part, je vous atteste qu’elle me ferait injure.

Le vieux Gaskine alla frapper à une petite porte, près de la cuisine, et une jeune fille sortit d’une chambre, la seule dont on eût épargné la visite à madame Ossokhine, et qui était une espèce de lingerie.

La muse dédaignée de Jaroslaw paraissait plus jeune que lui de deux ou trois ans. Elle avait la figure large, blanche, le front bombé, le menton proéminent. De beaux yeux noirs vivifiaient cette figure placide. Une intelligence droite et positive, une volonté ferme, une patience à toute épreuve se