viez la faire trembler, et c’est vous qui tremblez devant elle ?
Il affecta de se moquer de celui qui l’étonnait. Il déclara que les poètes étaient d’un sexe intermédiaire, au-dessous de l’homme ; qu’on ne pouvait pas compter sur eux pour une résolution vigoureuse ; puis, s’échauffant, il demanda jusqu’où Nadège avait poussé la coquetterie pour charmer le satiriste.
Jaroslaw ne lui permit pas de continuer. Il releva la tête et interrompant rudement son Mécène :
— Prenez garde, Diogène. Je vous ai payé ma dette, nous sommes quittes. J’en ai contracté une maintenant envers madame Ossokhine ; je ne permettrai pas que vous l’insultiez.
— Vous êtes fou, mon poète.
— J’ai été fou et je me suis cru poète ; mais il m’a suffi de voir Nadège pour reconnaître ma folie, et de l’entendre parler pour me convaincre que je ne suis pas poète.
— Alors, vous êtes amoureux d’elle ?
Diogène avait dit cela avec un accent si furieux que Jaroslaw, sans être devenu tout à coup un grand observateur, fut frappé de cette violence. Il le regarda en face et osa sourire au terrible ennemi des femmes.
— J’en suis peut-être moins amoureux que vous ! lui dit-il nettement.
Diogène blêmit, se rejeta en arrière, et, riant d’un rire nerveux :
— Amoureux, moi ! C’est parce que je la déteste que vous supposez cela ?