fit réfléchir Banaï, qui se dit : Tous, jusqu’à Abraham, le plus parfait des patriarches, tous sont sujets aux faiblesses humaines. »
Mintschew, de la main, fit un signe.
« Si donc Abraham était soumis aux faiblesses humaines, comment serions-nous parfaits ? conclut Pintschew. Qu’as-tu à répondre ? Rien. N’est-ce pas que tu ne peux rien objecter ? »
Il se tut un instant, et, comme Mintschew restait tranquille et ne parlait pas, il s’écria joyeusement :
« Vous voyez bien qu’il ne peut rien objecter.
— Parce qu’il est mort, dit un des assistants.
— Mort ? »
Pintschew lui jeta un regard de pitié.
« Pourquoi serait-il mort ? Mintschew ! »
Il se souleva et se pencha sur son ami.
« Mintschew ! Dors-tu ? Réponds-moi donc ! »
Longtemps on n’entendit pas un mot, pas un souffle.
« Mintschew ! s’écria Pintschew d’une voix plaintive et de plus en plus désespérée, — Mintschew ! mon doux Mintschew ! — Mais… je crois qu’il est véritablement mort !… Mon petit Mintschew ! »
Il se mit à pleurer très-haut. Les autres voulaient l’emmener. « Il trouble la tranquillité du cadavre, » disaient-ils ; mais Pintschew se révolta, et resta de force. Et même il joignit les mains et murmura la prière des morts : L’Éternel l’avait donné, l’Éternel l’a ôté, que le saint nom de l’Éternel soit béni !…
Il n’alla pas plus loin ; les larmes étouffèrent sa voix.
Les assistants finirent la prière, puis quittèrent la chambre. Pintschew demeura assis dans son fauteuil, à côté du lit sur lequel Mintschew reposait, et regarda son ami les mains croisées.