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À KOLOMEA.

Aldona lui appliqua avec le manche du fouet un coup si terrible, qu’il se redressa et s’emporta.

Il reprit sa course. Il tenta un effort suprême… puis son souffle s’arrêta.

Devant le hangar il s’abattit.

D’un bond, Aldona fut hors du traîneau. Elle gravit lestement l’échelle qui conduisait au grenier à foin. Elle n’eut que le temps d’y arriver et de renverser l’échelle. Déjà les loups se pressaient sur la place en écumant.

Elle entendit encore les hennissements désespérés de son cheval, les hurlements infernaux des bêtes féroces, puis elle s’évanouit.

 
 

Une violente détonation la rappela à elle ; elle se leva. Au dehors, des coups de feu s’entre-croisaient. Ils se succédaient avec rapidité. Plus de doute, c’était du secours.

En un instant elle retrouva toute son énergie. Elle courut vers la porte entre-bâillée qui lui avait livré passage et adressa des signaux avec son mouchoir.

« Regardez, la voilà ! » cria une voix bien connue.

Aldona vit des torches flamboyer, des clameurs frappèrent ses oreilles ; elle reconnut les serviteurs qui ramassaient l’échelle et la dressaient contre le hangar.

Elle se hâta de descendre, saluée par les cris de joie de ses gens. Comme elle atteignait le dernier échelon, Igar s’avança, lui prit les mains et les baisa avec frénésie.

Peu de temps après avoir quitté Aldona, il était revenu à la seigneurie, où on l’avait instruit de son expédition aventureuse. Une inquiétude indicible s’empara de lui. Il enfourcha un cheval et, suivi de quelques domestiques, se mit à sa recherche.