Page:Sacher-Masoch - A Kolomea - Contes juifs et petits russiens, 1879.djvu/237

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
227
NOTRE DÉPUTÉ.

pectives, un double malheur semblait sur le point d’arriver ; le feuillet paraissait se tourner de lui-même.

Madame Téofila oublia subitement ses plans patriotiques. Elle s’était éprise de M. Anielowicz. Quant à son mari, il ressentait une véritable passion pour la femme du prêtre.

Un renard passa à quelque distance. Elsbeta le visa, et le blessa grièvement. Il s’étendit dans la neige, et se mit à hurler.

« Hurle, brute immonde ! jura M. Kamil. Avec ta blessure, tu as encore plus de chance que moi, pensa-t-il. Il ne m’est même pas permis de hurler. »

Cependant, madame Téofila se pénétrait de plus en plus de sa tâche. Il lui semblait qu’elle ne pourrait jamais faire assez pour le bien de son pays. Aussi faisait-elle éclater tous ses charmes, comme une file de pétards en l’honneur du timide évangéliste.

Immédiatement après la chasse, le comité polonais se mit en devoir de fixer son choix sur un candidat qui lui en parût digne ; c’est-à-dire que le comité polonais, vêtu de sa kasabaïka de velours vert, trônant dans un moelleux fauteuil, et fumant une excellente cigarette, demanda d’un ton calme à son mari, qui lui tenait compagnie :

« Sais-tu qui sera nommé à Horodenka ?

— Par Dieu, repartit M. Kamil, je voudrais bien le savoir !

— Eh bien ! mon ami, ce sera toi, continua la baronne.

— Moi ? s’écria le mari épouvanté. Je connais un candidat infiniment plus digne de cet honneur.

— Moi, je n’en connais pas qui le mérite plus, répondit-elle.

— Tu me flattes, chère Téofila, balbutia M. Kamil,