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À KOLOMEA.

conséquent vingt-deux ans plus tard, Esra n’a pu prescrire ni les prières ni les sacrifices. »

Ici, Blauweisz secoua la tête à plusieurs reprises en murmurant : « Quel cerveau, bon Dieu ! »

« Et avec cela, conclut Mintschew, le Talmud, ce même Talmud que je passe pour ne pas connaître, affirme dans le Tractat Barachol, que tu connais si bien que les « dix-huit paroles de bénédiction » datent de la destruction du second temple, et ont été écrites par le rabbin Simon Hamaliel. »

À ce moment, de l’intérieur, quelqu’un appela Kauniz Blauweisz, qui rentra tout effrayé dans la salle du bal. Et comme Markus Jolles, le marchand, fut le premier convive qu’il rencontra, il se pendit à son bras et lui demanda :

« Pour l’amour de Dieu ! qui est l’homme qui se dispute dehors avec votre gendre ? Le malheureux Pintschew est tondu comme un mouton !

— Hé ! qui serait-ce, repartit aigrement Jolles, qui durant cette soirée se comparait lui-même intérieurement à un mouton aux mains du tondeur, qui serait-ce sinon Mintschew ? Depuis qu’ils sont au monde, ces deux êtres n’ont pas cessé de se disputer ! »

L’orchestre s’était tu. Les invités s’éloignaient peu à peu. Pintschew et Mintschew continuaient leur discussion, sans saluer personne.

Blauweisz sortit de sa maison ; il avait mis son haut bonnet de martre ; il était maintenant le type de l’aristocrate juif. Derrière lui marchait une belle fille, tout échauffée par la danse et pelotonnée dans un cachemire rouge. Elle s’arrêta à la porte, fixant ses grands yeux dans l’ombre, comme si elle cherchait quelqu’un. Au même instant retentit la voix de Pintschew.