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À KOLOMEA.

Pintschew s’était assis sur une caisse vide qui se trouvait devant la maison de son beau-père ; une sorte de fièvre le secouait. Il avait fourré ses mains dans les larges manches de son tabar de soie, et son visage disparaissait presque entre les pointes de son large col et son haut bonnet de martre, de sorte qu’on n’apercevait plus que ses yeux qui papillotaient.

« Et pourtant que dit Moïse dans son IVe livre, vi, 24, où il prescrit comment les fidèles… avec la bénédiction des prêtres… et v, 26, — 1-12, comment ils apportaient au temple les prémices de leurs récoltes… et encore v, 14, — 22-29, où il est dit comment ils avaient à se comporter en offrant la dîme ? Tout cela ne peut-il passer pour un office divin ? Et oses-tu prétendre que celui qui apportait au temple une offrande de reconnaissance ou d’expiation, la présentait à Dieu sans lui rendre grâces ? Non, avoue au moins que tu n’oses pas l’affirmer ! »

Ici, Pintschew s’émut et recommença à vociférer.

« Celui qui apportait une offrande s’adressait sûrement à l’Éternel. Par conséquent il priait ; il priait dans le temple, donc publiquement. N’est-il pas question dans le livre de Samuel, i, 1-9, et même encore plus loin, de la prière de Hanna ? Et dans le livre des Rois, viii, 15-62, de la requête de Salomon ? Salomon ne dit-il pas clairement dans sa prière : « Écoute, ô Dieu ! celui que l’amertume de son cœur attire dans ce saint lieu pour t’y invoquer. » Et cela n’est-il pas une preuve évidente que non seulement lui, mais d’autres encore y ont prié ? Et ne parle-t-on pas dans le livre de Daniel, ix, 4-12, de la requête que ce prophète adressait à Dieu trois fois par jour ?