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MAGASSE LE WATACHEKO.

reux, la souplesse de ses belles formes était accusée par une grossière chemise noire imbibée d’huile et retenue, au moyen d’une boucle en cuivre, par sa culotte de drap bleu, et ses chodaks[1] de cuir rouge. Il avait jeté sur son dos sa jaquette brune. Sous son chapeau de feutre noir à larges bords, orné d’étincelantes plumes de paon, de rubans rouges et de pièces de monnaie, ses longs cheveux noirs retombaient, couvrant la naissance de ses épaules. Sa large ceinture, où brillait la lame d’un couteau, était garnie de boutons de métal. Une sorte de besace carrée, de laine teinte, agrémentée de broderies, y était attachée, pendant de droite à gauche. Sur son épaule reposait un fusil dont le chien damasquiné portait gravé un passage du Coran, et qu’il avait sûrement prélevé sur le butin pendant les guerres turques. De l’autre main, il brandissait son topar[2].

« Mais que me veux-tu donc ? Prends mes bijoux, je te les abandonne de bon cœur, » dit la baronne.

Le brigand secoua la tête.

« Ne me prenez pas pour un barbare, ma jolie dame, dit-il humblement ; vous avez envoyé votre mari à ma recherche ; il me cherchera longtemps, ce cher homme ! Aussi, je trouve que ce serait un péché, voire même un crime, de laisser une gentille petite femme comme vous toute seule durant un temps aussi prolongé. C’est pourquoi, dit-il en se rapprochant, je suis venu vous égayer un peu, ma noble dame. »

La nerveuse petite femme faillit s’évanouir.

« Mon Dieu ! fit-elle en soupirant, tandis que son regard mesurait avec un effroi mêlé de complaisance la taille athlétique du Watacheko.

  1. Sandales.
  2. Massue des Houzoules.