Page:Sacher-Masoch - A Kolomea - Contes juifs et petits russiens, 1879.djvu/18

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
8
À KOLOMEA.

maison de prières, il entend par là le temple que les fidèles lui ont élevé. »

Mais Pintschew n’était pas homme à se laisser interrompre pour si peu. Il commença à vociférer et à hurler comme un malheureux qui appellerait à l’aide, à la fenêtre d’une maison incendiée.

« Non, mille fois non, répétait-il, Dieu ne dit pas leur maison, mais ma maison de prières. Il s’ensuit que Dieu a un temple, et, s’il a un temple, il est probable qu’il y prie.

— Et serais-tu assez aimable pour me dire ce que Dieu demande dans sa prière ? objecta Mintschew en effeuillant une rose et en promenant voluptueusement les pétales sous ses narines. Allons, parle, puisque tu es un savant, puisque tu te crois un Jlau[1].

— Certainement, je parlerai, repartit Pintschew, pâle et tremblant de tous ses membres.

— Eh bien ! que demande l’Éternel ?

— Le Talmud…

Ici la voix de Pintschew sifflait à peine entre ses dents.

— Le Talmud rapporte dans le Tractat Barachol, ix, que Dieu s’adressa la prière suivante :

« Je désire que ma colère soit dominée par ma compassion. »

— Assez ! interrompit Mintschew, assez ! Ne sens-tu pas, monstre, que tu offenses Dieu ?

— Moi… je… j’offense Dieu !… »

Pintschew s’approcha de Mintschew, prêt à lui arracher la barbe.

« Ne comprends-tu pas que tu abaisses Dieu en pré-

  1. Rabbin.