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À KOLOMEA.

M. Adam le regarda stupéfait.

« Permettez, commença le prêtre, il serait peut-être plus fin de s’en emparer comme dans Fra Diavolo.

— Que voulez-vous dire ?

— Par la ruse, monsieur Adam, par la ruse ! Tous les bandits célèbres ont péri, ont été trahis ou livrés par leurs bien-aimées. Le robuste Samson de l’Ancien Testament n’y a-t-il pas passé comme les autres ? »

M. Adam renferma son menton dans sa main, fronça les sourcils, prit une attitude de penseur et murmura :

« Idée excellente, très bonne idée ! »

Cette excellente idée absorba le digne couple à un tel point qu’il se retira pour la mûrir à son aise : la jolie baronne, dans les profondeurs de son appartement, et le seigneur, au milieu des solitudes de sa grange. Quant au père Antoni, il se dirigea du côté de la cour.

Il y trouva le Cosaque en train de nettoyer la calèche. Sans perdre un instant, il s’avança, se pencha vers lui, les genoux emprisonnés dans ses deux mains, et lui demanda d’une voix aussi basse que doucereuse :

« Mon ami, quels renseignements peux-tu me donner sur la fiancée de Magasse ? »

Le Cosaque feignit de ne rien entendre et continua sa besogne. Au bout de quelques minutes, il releva la tête et dit en clignant légèrement de la paupière :

« Nous aurons de la pluie, les canards barbotent.

— Eh ! laisse-les barboter, repartit le père Antoni avec calme ; mais, dis-moi, ainsi, Margasse a une amoureuse ?

— Oui ?

— Le Watacheko.

— Dois-je vraiment ?…

— Ne l’as-tu pas dit il n’y a qu’un moment ?