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MAGASSE LE WATACHEKO.

— Pas possible ! s’écria l’abbé. Et de la paume de sa main il frappa sur la table.

— Et que vous figuriez-vous donc ? continua M. Adam, tirant avec extase de longues bouffées de sa pipe. Un Houzoule mourra de faim dans ses solitudes plutôt que de gagner sa vie sous notre toit. C’est un peuple misérable, mais qui s’habille mieux que les paysans. Les Houzoules s’épuisent à cultiver leurs misérables morceaux de terrain ; ils font paître leurs brebis ; ils trafiquent même volontiers leurs petites productions. À lui seul un Houzoule a plus de courage que dix de nos hommes. Beaux gars, du reste, superbes gars ! Et quelles femmes ! »

M. Adam ferma les paupières et fit couler un jet de fumée entre ses narines.

« Que me dites-vous ?

— On y rencontre des types pareils à ceux des prairies américaines, interrompit madame Kauwigka ; des types comme on n’en voit que dans les romans.

— Il s’y trouve aussi des sorcières, ajouta très gravement le seigneur.

— Mais, je t’en prie, exclama la baronne.

— Eh bien ! quoi ?… je pourrais vous en conter de fortes, répéta M. Adam, fumant avec courroux et se retranchant derrière un impénétrable rideau de fumée.

— Vraiment ! »

Le Cosaque entra pour débarrasser la table. Madame Kauwigka enveloppa son mari d’un regard méprisant qu’elle lui lança par-dessus son épaule, et se tourna aussitôt après vers M. Antoni.

« Il y a, parmi eux, des gens qui connaissent les puissances secrètes de la nature, expliqua-t-elle. Cette