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À KOLOMEA.

haydamaks, cria le baron, la face rouge et contractée par la colère. Allez, allez conclure des traités avec les bandits. Ce n’est pas d’aujourd’hui qu’elle est dressée la potence destinée à Magasse.

— Faites-le chasser de la cour par vos chiens ! commanda la baronne.

— Magasse me vengera ! Beaucoup de plaisir.

— Hé ! Sultan ! cria le Cosaque, hé ! Blyteau ! sus ! sus ! »

Le paysan s’enfuit aussi rapidement que le lui permettaient ses vieilles jambes. Les chiens le poursuivirent en aboyant.

« Vraiment, ici le peuple est par trop désagréable ! » dit le père Antoni. Et il ferma galamment la fenêtre. On se remit à table.

« Voyez-vous, c’est la montagne qui les rend ainsi, repartit M. Adam, occupé à introduire dans sa bouche une large tranche de pain beurré.

— Que cela ne vous effraye pas, s’écria madame Kauwigka. Nous savons y mettre ordre.

— Permettez, reprit le jeune prêtre, les paysans sont ici très-sauvages. Vous disiez tout à l’heure que c’est la montagne qui les rend tels. La croyez-vous capable d’exercer quelque influence sur leur caractère ? »

Le seigneur ouvrit de grands yeux et prit un air important.

« Ça dépend de la manière dont vous l’entendez. Oui et non. Mais à quoi voulais-je donc en venir ? Nous avons sur nos montagnes une population tout autre que dans la plaine. Le Houzoule est fier du nom qu’il porte. Il s’est acquis une certaine supériorité sur les paysans, d’abord par son indépendance, ensuite parce que la loi touchant le robot ne l’atteint pas.