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de voyage.

courtier de la vente moyennant une redevance qui varie suivant l’importance des affaires. Le courtier actuel paye sa charge 15,000 piastres. Les négociants et capitaines ont en outre un courtier à eux. C’est un Chinois qui est le nôtre : curieuse figure osseuse, aux pomettes saillantes, aux yeux bridés et d’une mobilité remarquable, elle pétille d’intelligence et de ruse. Type à peindre ; ce courtier est tout long, agile et souple comme un serpent ; il est fort riche et discutera une heure pour gagner un pétis. J’ai vu vingt fois notre capitaine impatienté par ses lenteurs et ses détours, sur le point de rompre un marché. Sa douceur, ses prévenances obséquieuses et son sourire, qui ne se démentent pas un instant, démonteraient la patience la plus exercée. Si on lui refuse ce qu’il demande, il a des larmes à son secours, il gémit en criant qu’on lui retire le pain de la bouche et en même temps il vous saignerait jusqu’à la dernière goutte en jurant par ses ancêtres que la misère est grande et qu’il gagne à peine pour vivre. — C’est le juif élevé à la dixième puissance.

«Lombok, en outre de sa végétation, est admirablement cultivé. Les plaines sont couvertes de rizières disposées en pentes et arrosées par des sources venant du haut pays. La monnaie la plus usitée dans l’île est la piastre d’Espagne et les dollars américains. Pour les menus achats on a le pétis qui n’est autre que la sapoque chinoise, dont 1,400 font la piastre. C’est fort embarassant : avec deux piastres de monnaie, un honnête homme en a la charge d’un