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humilité dans la maison de Dieu nous avaient déjà profondément émus. L’intérieur est encore plus pauvre que le dehors, tout y rappelait la crêche de Bethléem ; mais la prière, dans les premiers temps de l’église, n’en montrait pas moins vers le ciel pour être prononcée dans le catacombes. — Outre le délabrement que présentait cette grande case, plusieurs poutres brisées, la toiture défoncée en quelques endroits indiquaient une secousse extraordinaire, une dévastation récente. — Voici ce que le Père Martial nous raconta :

L’ouragan pendant la messe.

« Quinze jours auparavant, le grand coup de vent que nous avions nous-même éprouvé en mer, avait sévi sur l’île d’une manière terrible. C’était un jour de fête ; tous les fidèles remplissaient le petit sanctuaire, le père Martial était à l’autel et officiait ; le vent sifflait avec violence, les feuilles de pandanus s’envolaient en lambeaux, les poutres et les charpentes craquaient de toute part et l’église tremblait sur sa base. Le Père Martial voulait cesser et ne pas exposer tout ce monde à être écrasé sous les décombres. Mais ces sauvages lui répondirent : « continue Père et n’aie crainte, si les poutres manquent nous les remplacerons. » En effet, les plus robustes se mirent en arc-boutant des deux côtés de la nef ; la voute se brisait comme le verre ; la tempête redoublait de fureur et le tonnerre envoyait ses éclats dans l’assemblée, mais les poutres de la toiture étaient remplacées par des étais vivants, et au milieu de ce fracas, des