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DE CHIMIE AGRICOLE.

élevée en présence d’un corps poreux spécial qu’on nomme la mousse de platine. Il se produit alors de l’acide nitrique facile à reconnaître par sa réaction acide très intense, ou par les fumées qu’il dégage avec un excès d’ammoniaque[1].

Il semble au premier abord que la nitrification naturelle est assez comparable à l’expérience que nous venons de décrire. L’ammoniaque qui se trouve dans le sol, perméable à l’air atmosphérique, peut subir sans doute son action oxydante, grâce à la porosité de la terre elle-même, qui jouerait ici le même rôle que la mousse de platine.

Cette manière de voir fut adoptée, et on s’appliqua à créer des nitrières artificielles réalisant les conditions les plus favorables au phénomène. On mélangeait des matières organiques dégageant de l’ammoniaque avec des débris poreux permettant la libre circulation de l’air au sein de la masse, en ayant soin d’ajouter une certaine dose d’alcalis, potasse ou soude, destinés à fixer l’acide nitrique produit. Or, les résultats de ces tentatives furent extrêmement variables : de deux nitrières installées de la même manière, l’une était productive, l’autre refusait de fournir la plus petite dose de nitrates.

C’est qu’en réalité le phénomène exige la présence d’un microbe spécial qu’on nomme le ferment nitrique. Ce ferment n’existe pas dans l’air, ou du moins s’y trouve très affaibli ; mais on le trouve toujours dans la terre arable. Il est extrêmement petit : il se présente en corpuscules arrondis ou légèrement allongés, isolés ou réunis deux par deux, assez semblables au ferment qui produit le vinaigre (le mycoderma aceti), et selon les observations de M. Duclaux, rappelant

  1. L’ozone produit immédiatement à froid la même oxydation, sans le secours de la mousse de platine.