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DE CHIMIE AGRICOLE.

que qui, dissous par la sève ascendante, arrive avec elle dans les feuilles et y subit l’action chlorophyllienne ?

C’est là une question dont l’importance est visible, non seulement du côté théorique, mais encore au point de vue de la pratique agricole. Les engrais carbonés apportent-ils aux récoltes une source abondante d’alimentation carbonée ?

Les avis sont assez partagés sur ce sujet. Quelques-uns croient que la matière carbonée du sol ne sert jamais à fournir du carbone à la plante verte : l’acide carbonique de l’air y suffit seul.

D’autres, au contraire, avec Boussingault, estiment que la matière organique de la terre fournit par sa combustion lente, du gaz carbonique qui, charrié jusqu’aux feuilles par les sucs végétaux, y est réduit par la chlorophylle sous l’influence de la lumière.

Certains savants pensent que la substance organique du sol arable peut directement être absorbée par les racines et concourir tout de suite à la nutrition des végétaux. C’est ce qui a lieu visiblement pour les plantes sans chlorophylle non parasites. Le sol sur lequel vivent les champignons est toujours pourvu de débris végétaux en décomposition ; c’est dans leur substance qu’ils puisent leur nourriture. La néottia, plante sans chlorophylle de la famille des orchidées, vit de la même façon. Il semblerait assez difficile d’admettre que ce genre de nutrition n’existe jamais dans les plantes vertes[1].

Quoi qu’il en soit, et c’est là un point bien établi qui diminue beaucoup l’importance pratique de ces désaccords scientifiques, la nutrition carbonée des plantes vertes, à partir de la matière organique du sol, est, si elle existe, peu importante ; c’est presque exclusi-

  1. Certaines expériences sur la culture des betteraves, récemment publiées par M. Débérain, sont favorables à cette utilisation directe de la matière carbonée de la terre.