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Contez à M. l’archevêque (d’Arles) ce que m’a fait dire M. le premier président pour ma santé. J’ai fait voir mes mains et quasi mes genoux à Langeron, afin qu’il vous en rende compte. J’ai dune manière de pommade qui me guérira, à ce qu’on m’assure ; je n’aurai point la cruauté de me plonger dans le sang d’un bœuf, que la canicule ne soit passée. C’est vous, ma fille, qui me guérirez de tous mes maux. Si M, de Grignan pouvait comprendre le plaisir qu’il me fait d’approuver votre voyage, il serait consolé par avance de six semaines qu’il sera sans vous.

Madame de la Fayette n’est point mal avec madame de Schomberg. Cette dernière me fait des merveilles, et son mari à mon fils. Madame de Villars songe tout de bon à s’en aller en Savoie ; elle vous trouvera en chemin. Corbinelli vous adore, il n’en faut rien rabattre ; il a toujours des soins de moi admirables. Le Bien bon vous prie de ne pas douter de la joie qu’il aura de vous voir ; il est persuadé que ce remède m’est nécessaire, et vous savez l’amitié qu’il a pour moi. Livry me revient souvent dans la tête, et je dis que je commence à étouffer, afin qu’on approuve mon voyage. Adieu, ma très-aimable et très-aimée ; vous me priez de vous aimer ; ah ! vraiment je le veux bien : il ne sera pas dit que je vous refuse quelque chose.


174. — DE Mme DE SÉVIGNÉ À Mme DE GRIGNAN.

À Paris, mercredis août 1676.

Je veux commencer aujourd’hui par ma santé ; je me porte très-bien, ma chère enfant. J’ai vu le bon homme de Lorme à son retour de Maisons ; il m’a grondée de n’avoir pas été à Bourbon : mais c’est une radoterie ; car il avoue que, pour boire, Vichy est aussi bon : mais c’est pour suer, dit-il, et j’ai sué jusqu’à l’excès : ainsi je n’ai pas changé d’avis sur le choix que j’ai fait.

Aire est pris. Mon fils me mande mille biens du comte de Vaux, qui s’est trouvé le premier partout ; mais il dénigre fort les assiégés, qui ont laissé prendre en une nuit le chemin couvert, la contrescarpe, passer le fossé plein d’eau, et prendre les dehors du plus « bel ouvrage à corne qu’on puisse voir, et qui enfin se sont rendus le dernier jour du mois, sans que personne ait combattu. ils ont été tellement épouvantés de notre canon, que les nerfs du dos qui servent à se tourner, et ceux qui font remuer les jambes pour s’enfuir, n’ont pu être arrêtés par la volonté d’acquérir de la gloire ;