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qu’elles donnent on y oublieroit aisément qu’on a une âme, et que le repos qu’on y a est si grand, qu’il vise à la léthargie. Il est vrai que la scène y languit trop, et qu’on y mourroit, si de pareils événements ne ranimoient.

Pour ce qui me regarde, ma chère cousine, je vous dirai que je pars de la cour pour Chaseu, fort content du traitement que j’ai reçu du Roi, et de ses promesses[1] Il s’est passé en trois mois que j’ai presque toujours été à Versailles des choses dont le détail seroit trop long à écrire, mais que je vous apprendrai un jour et que vous trouverez assez singulières[2]. Vous vous moquerez peut-être de moi, ma chère cousine, quand vous saurez qu’à mon âge je me réjouis, et que je compte sur les promesses qu’on me fait. Sur cela je vous dirai que si je voulois être fâché, j’en pourrois venir à bout, sans en aller chercher bien loin des sujets ; mais que je veux être content ; et comme je vous ai déjà dit, ces sentiments contribueront à ma santé et à mon salut. Cet ami que vous honorez et que vous révérez tant, les approuve, et se portant fort bien, marche au ciel par des voies toutes contraires aux miennes; car il est comblé de grâces et de prospérités[3]. Monsieur d’Autun est ici ; s’il me vient dire adieu, je n’oublierai pas de lui faire vos compliments. Trouvez bon aussi, ma chère cousine, que je fasse les miens à M. de Sévigné, et que je vous assure que personne, sans l’excepter lui, ne vous aime plus que je fais.

  1. 4. Dans l’édition de 1697, « ses promesses » a été remplacé par « mes espérances, » et la phrase qui suit ces mots a été supprimée.
  2. 5. Voyez la lettre du 19 novembre suivant.
  3. 6. L’édition de 1697, qui ne donne pas le dernier alinéa de la lettre, ajoute ici cette petite phrase : « II faut dire la vérité, personne aussi n’en est plus digne. »