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bien fort, lui dit : « Mon Père, vous le voulez eh bien ! c’est Pascal morbleu[1] ! -- Pascal, dit le Père tout rouge, tout étonné, Pascal est beau autant que le faux peut l’être. -- Le faux, dit Despréaux[2], le faux! sachez qu’il est aussi vrai qu’il est inimitable ; on vient de le traduire en trois langues. » Le Père répond Il n’en est pas plus vrai. » Despréaux s’échauffe, et criant comme un fou « Quoi mon Père, direz-vous qu’un des vôtres n’ait pas fait imprimer dans un de ses livres, qu’un chrétien n’est pas obligé d’aimer Dieu[3]? Osez-vous dire que cela est faux ? Monsieur, dit le Père en fureur, il faut distinguer. Distinguer, dit Despréaux distinguer, morbleu! distinguer, distinguer si nous sommes obligés d’aimer Dieu » et prenant Corbinelli par le bras, s’enfuit[4]30 au bout de la chambre puis reve-

  1. 27. «  » Eh bien, morbleu !c’est Pascal. » (Édition de 1754.)
  2. 28. Reprit Despréaux. » (Ibidem.) Voici le titre de la traduction en trois langues dont il est parlé â la fin de la phrase « Les Provinciales ou lettres escrites- par Louis de Montalte à un provincial de ses amis et aux RR. PP. Jésuites….. Traduites en Latin par Guillaume Wendroch (pseudonyme de Nicole), théologien de Saltzbourg. En Espagnol par le Sr Gratien Cordero de Burgos. Et en Italien par le Sr Cosimo Brunetti, gentilhomme florentin. Cologne, Balthasar Winfelt, 1684, in-8°. »
  3. 29. C’est ici une de ces fameuses disputes que Despréaux disoit avoir soutenues en plus d’un endroit au sujet de l’amour de Dieu, et peut-être la première qui lui ait fait naitre l’idée de son épître à l’abbé Renaudot, qu’il ne composa qu’en 1695. Voyez l’Épitre XII de Despréaux, et la dixième Lettre provinciale. (Note de Perrin.) Boileau a, eu évidemment en vue une discussion toute semblable, dans ce passage de l’épître citée : Cessez de m’opposer vos discours imposteurs Confesseurs insensés, ignorants séducteurs Qui pleins des vains propos que l’erreur vous débite, Vous figurez qu’en vous un pouvoir sans limite Justifie à coup sûr tout pécheur alarmé, Et que sans aimer Dieu l’on peut en être aimé.
  4. 30 « II n’en est pas plus vrai pour cela. Despréaux s’échauffe là-