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j’avois été à Paris, j’aurois été lui baiser la mule dans la chambre de l’abbé Bigorre / il y est peint en perfection. C’est le cardinal Ottobon, Vénitien[1] intime ami de M. et de Mme de Chaulnes, et de Mme de Kerman, dont il adoroit le mérite, joint à une beauté de dix-huit ans. Voilà l’homme à qui nous avons affaire ; voilà ce duc dans le démêlement des plus grandes affaires18. « des plus grands intérêts » (Edition de 1754.)le voilà qui vous ôte votre cher Avignon .je souhaite qu’il retrouve tout son bon esprit dans cette occasion tel que je l’ai vu ; il n’est pas à propos qu’il en laisse derrière lui. Mme de Lavardin me mande que ce pape est le plus honnête homme1Erreur de référence : Balise fermante </ref> manquante pour la balise <ref>.) Le cardinal Ottoboni, évêque de Porto et sous-doyen des cardinaux, étoit premier chef d’ordre (le 4 octobre) lorsque le duc de Chaulues fut admis comme ambassadeur du roi de France à l’audience du sacré collège ; « et comme le duc, après sa révérence, se mettoit en devoir de se retirer, le cardinal ne put s’empêcher, en s’approchant plus près de la grille, de lui témoigner tout bas la joie qu’il avoit de le revoir ; il lui demanda ensuite des nouvelles de la santé de la duchesse de Chaulnes, qu’il avoit connue</ref>9 et le plus habile du sacré collège ; mais,

  1. 17. Il fut élu pape le 6 octobre 1689, sous le nom d’Alexandre VIII ?douze jours après l’entrée des cardinaux français dans le conclave. Le Roi, prévenu, par les rapports inexacts du cardinal d’Estrées, regardait le cardinal Ottoboni comme le principal auteur des mesures que le dernier pape avait adoptées contre la France ; et les cardinaux français eurent ordre de traverser sous main son élection, dans le cas où ces bruits auraient quelque fondement. Le due de Chaulnes et le cardinal de Bouillon reconnurent bientôt que ces imputations, ne reposaient sur rien. Coulanges rend compte dans ses Mémoires, p.98, d’une conversation très-importante que le cardinal de Bouillon eut avec Ottoboni avant son élection, dans laquelle ce dernier justifia pleinement la conduite qu’il avait tenue vis-à-vis de la France, sous le dernier pontificat. Aussi les cardinaux français concoururent-ils à son élection, malgré l’opposition que le cardinal d’Estrées y apportait secrètement. (Note de l'édition de 1818.)