de M. de Chaulnes. On ne sauroit faire un bon compte de toute l’extravagance de cet homme[1]: c’est un fou ; il est habillé comme un gueux ; la dévotion est tout de travers dans sa tête. Nous voulûmes lui persuader de tirer sa femme[2] d’Angleterre, où elle est en danger d’être chassée, et peut-être pervertie, et où elle est avec les ennemis du Roi. Il en revient toujours à dire qu’elle vienne avec lui : avec lui, bon Dieu ! et il en faut revenir à ce que dit Saint-Évremont, elle est dispensée des règles ordinaires, et l’on voit[3] sa justification en voyant M. de Mazarin.
Nous allâmes le lendemain, qui étoit jeudi, dans un lieu qu’on appelle l’Orient[4], à une lieue dans la mer ; c’est là qu’on reçoit les marchands et les marchandises qui viennent d’Orient. Un M. le Bret[5], qui arrive de Siam, et qui a soin de ce commerce, et sa femme qui ar-
- ↑ 10. « On ne sauroit donc faire un bon compte de l’extravagance de cet homme. » (Édition de 1754.) Les deux petits membres de phrase qui suivent ne sont pas dans l’édition de 1737, qui reprend à : « la dévotion, etc. »
- ↑ 11. Voyez tome II, p. 84, note 2. La duchesse de Mazarin mourut en Angleterre dix ans plus tard, le 2 juillet 1699.
- ↑ 12. « Avec lui, bon Dieu ! ah ! disons avec Saint-Evremont qu’elle est dispensée des règles ordinaires, et qu’on voit, etc. » (Édition de 1754.)
- ↑ 13. « Nous allâmes le lendemain en un lieu qu’on appelle l’Orient. » (Édition de 1737.) Ce n’était encore qu’un lieu destiné à l’arrivée des vaisseaux de la Compagnie des Indes orientales. Cette célèbre compagnie avait commencé sous les auspices de Colbert, en 1664. La ville de Lorient fut bâtie vers 1720. (Note de l’édition de 1818.) Voyez le volume intitulé: Relation de l’établissement de la compagnie francoise pour le commerce des Indes orientales, par Charpentier, de l’Académie françoise. Paris, Cramoisy, 1666, in-4o.
- ↑ 14- On lit dans le Journal de Dangeau, au 24 juillet 1688 M. le Bret, que le Roi avoit envoyé au roi de Siam, est arrivé à Brest. Il a mandé que le voyage a été fort heureux, que le roi de Siam a livré aux François les deux meilleures places de son royaume. Le P. Tachard, jésuite, est aussi revenu avec des mandarins, qui accompagnent des présents magnifiques que le roi de Siam envoie au Roi et à toute la maison royale. »