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cependant une ingrate, car jamais la maréchale ne lui avoit arraché les yeux..

Monsieur le chevalier vous a parlé d’Angleterre; on attend la nouvelle de ce qu’ils auront fait, après avoir dit que le roi n’étoit plus roi, qu’il avoit quitté [1] : il faut savoir s’ils en auront élu un autre.

A neuf heures du soir.

Voici enfin, ma chère fille, la nouvelle d’Angleterre, qui est fort bonne pour nous. Le prince d’Orange n’est pas encore le maître : tout cela ne va pas si vite, [2] et la guerre ne se fera pas dans un moment, comme on le croyoit. Elle ne sera point si terrible cette année : nous sommes sur la défensive mais vous aurez bien des transes, bien des frayeurs inutiles, et vous ne voudriez pas même en être distraite; vous ne voudriez pas qu’on vous détournât un moment des dragons que vous voulez qui vous dévorent cet état m’en fait beaucoup, qui me dévoreront aussi [3] mais nos dragons ne se mordront pas, car je vois, ma chère enfant, que je m’en irai en Bretagne avec Mme de Chaumes. Toutes sortes de raisons m’y convient, hormis celles qui plairoient à mon cœur : il faut nécessairement que je donne ordre à une terre [4] que j’ai en ce pays-là, et qui vient à rien, si la capacité de l’abbé Char-

  1. Voyez plus haut, p.470, note 16 et p. 477, note 17. Dans l'édition de 1754 : «  que leur roi n'était plus roi dès qu'il avait quitté »
  2. 10. C’est seulement la Gazette du 26 février qui donne la nouvelle de l’élection de Guillaume et de Marie. On lit dans celle du 19 « Le roi (février), les Seigneurs (les Lords) s’assemblèrent... On ne sait pas encore quelle a Été leur résolution sur le point le plus important, qui est de savoir si le trône peut être considéré comme vacant. »
  3. 11. Des dragons que je vois tout prêts à vous dévorer; cet état m’en fait aussi beaucoup qui me dévoreront. » (Édition de 1754.)
  4. 12. La terre du Buron.