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1079 -— DE MADAME DE SÉVIGNÉ

A MADAME DE GRIGNAN.

A Paris, le jour de la Toussaint.

IL y a longtemps que je n’ai passé cette fête à Paris ; j’y suis tout étonnée. Nous aurons ce soir une agréable musique de cloches : Corbinelli en seroit ravi ; moi, je les souffrirai, parce que je ne suis pas dans ma gaieté ordinaire. Nous sommes si empêchés à prendre Philisbourg, que je ne voudrois pas m’éloigner un moment des nouvelles c’est ce qui fait, ma chère enfant, que je vous plains à l’excès d’être si longtemps à la merci de votre imagination, qui est la plus cruelle et la plus dévorante compagnie que vous puissiez avoir. M. de Vauban a mandé au Roi de songer à un gouverneur pour cette belle conquête

[1]. On vouloit croire que la place seroit à nous aujourd’hui[2], et pour surprendre, et pour faire honneur au jour de la naissance de Monsieur le Dauphin[3]. Voilà des lettres de votre enfant, il revient de des-




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  1. LETTRE 1079 1. « Le siège de Philisbourg va merveille. Monseigneur et Vauban ont mandé au Roi qu’il pouvoit nommer un gouverneur, et Sa Majesté a choisi Desbordes, qui étoit gouverneur de Landau. Il a été longtemps lieutenant-colonel de Navarre, et depuis qu’il s’est fait catholique, il a été fait inspecteur, brigadier, gouverneur de Landau, et présentement gouverneur de Philisbourg, dont on espère apprendre la réduction au premier jour. » (Journal de Dangeau, au 31 octobre.)
  2. 2. Philisbourg capitula dès le 29 octobre ; la garnison en sortit le Ier novembre. Cette place fut rendue en 1697 par le traité de Riswick. Les Français la prirent de nouveau en 1734. C’est à ce dernier siège que, le 12 juin 1734, le maréchal de Berwick fut emporté d’un coup de canon ; le maréchal de Villars l’ayant appris sur son lit de mort, s’écria « Cet homme a toujours été heureux. » Vie du maréchal de Vilars, tome IV, p. 350. (Note de l’édition de 1818.)
  3. . Le Dauphin était né le ler novembre 1661.