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1680 Cependant ces trois jours ont débredouillé le chevalier[1] ; c’est le premier bien qu’il ait reçu, et la première mort qui lui ait été bonne. Le Roi chasse les malheurs de toute façon[2] par ses bienfaits; les étoiles deviennent heureuses auprès de ce soleil[3] : voici qui devient bien poétique ; mais enfin disons en prose que vos frères sont bien placés en attendant mieux.

Nous avons senti le bout de l’an de la maladie du bon abbé[4]; mais ce n’a pas été sans beaucoup de reconnoissance de tous les soins que vous aviez de lui; je la partage, et je sais ce qu’il y avoit sur mon compte. Votre petit frère franchement ne se porte pas trop bien ; il est trop heureux d’être ici en repos ; pour moi je ne le crois point en sûreté : je crois que c’est une consolation pour lui de pouvoir se plaindre avec moi, et je suis fort aise aussi de pouvoir, au travers de mes gronderies, lui être bonne dans cette bizarre occasion. Vraiment il auroit mieux valu être fricassé dans de la neige que dans une sauce de si haut goût. Il me semble que vous ne voulez pas

    ou plutôt iv dans ces éditions-là, du 1er acte du Cid. Mme de Sévigné a substitué ce n’étoit à ne seroit. Voyez le Corneille de M. Marty-Laveaux, tome III, p. 118.

  1. 5. Le chevalier de Grignan devait avoir, après la mort du vieil évêque, une pension de mille écus sur l’évêché d’Évreux. Voyez la lettre du 21 février précédent, tome VI, p. 270. — Débredouiller, proprement ôter la bredouille, veut dire, au figuré, comme l’explique M. Littré dans son Dictionnaire, changer en bien une chance longtemps contraire.
  2. 6. « Chasse le malheur de toutes façons. » (Édition de 1754.)
  3. 7. Allusion à la devise que Louis XIV portait au carrousel de 1662 ; c’est la xxvie médaille de l’Histoire de Louis le Grand, par le P. Menestrier. Paris, 1693, in-fol. On y voit un soleil éclairant la terre de ses rayons, avec ces mots : Nec pluribus impar. 1662. (Note de l’édition de 1818.) — Le Mercure de février 1680 (p. 160 et 161), annonçant la mort de M. Douvrier, « fameux par un nombre infini de belles inscriptions et de devises, » nous apprend que c’était lui qui avait fait celle de Nec pluribus impar.
  4. 8. Voyez tome V, p. 562 et 563.