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La préférence de M. d’Antin à mon fils chez Monsieur le Dauphin ne me fait point de peine : en l’état où sont les choses cela doit être ainsi. Son temps viendra, s’il plaît à la Providence.

Comme vous dites, Madame, si l’on ne la regardoit, et la brièveté de la vie, les malheureux seroient sans cesse au désespoir. Votre triste réflexion ne me fait point de peine. Il y a longtemps que je vois mourir le monde sans m’attrister, quand ce ne sont pas mes amis qui meurent ; cela même ne me fait pas peur. Je vis plus régulièrement que je n’ai jamais fait : ainsi le pis qui me puisse arriver ne me donne point d’alarmes. Je vous conseille d’en user ainsi, ma chère cousine ; votre vertu vous est une raison de bien moins craindre que moi.


985. — DE CORBINELLI AU PRÉSIDENT DE MOULCEAU.

Du 20e février 1686.

Je n’ai jamais oublié, Monsieur, votre mérite distingué, ce mérite qui m’a fait dire avec autorité que vous étiez le plus illustre de tous les scélérats, et le plus scélérat des hommes les plus illustres du siècle. Le vulgaire ne comprendra rien à ce jargon ; mais c’est assez pour vous faire ressouvenir que je ne vous ai pas oublié, ou pour mieux dire, que votre mérite n’a pu l’être d’un homme qui l’a connu à fond. De vous dire pourquoi je ne vous ai pas écrit de temps en temps, ce seroit vous fatiguer inutilement ; mais si quelque chose peut réparer le tort que je me suis fait par là, c’est de vous assurer que j’ai tâché de ne pas me rendre indigne de vos bonnes grâces par mes études, et entre autres d’avoir coupé Ci-