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1679 M. de Lamoignon gagnât des millions à cette mort, il en seroit inconsolable[1]. Je ne m’en dédis pas, Madame, les grandes successions étouffent les sentiments de la nature, à moins que le mort n’ait été notre intime[2] ami. J’admire la conduite du Roi pour ruiner les huguenots : les guerres qu’on leur a faites autrefois, et les Saint-Barthélemy ont multiplié et donné vigueur à cette secte. Sa Majesté l’a sapée petit à petit, et l’édit qu’il vient de donner, soutenu des dragons et des Bourdaloues, a été le coup de grâce.


à madame de grignan.

Je ne saurois disconvenir, Madame, que vous ne m’ayez traité de beau, et que vous ne m’ayez fait plus d’honneur que je ne mérite, dans la réponse que vous m’avez faite ; mais cela n’empêche pas que vous ne m’ayez un peu méprisé, quand vous ne m’avez rien fait dire dans la lettre que m’écrivit Madame votre mère à son retour de Bretagne. Il est vrai que je ne suis pas le seul beau, ni le seul de bonne maison que vous n’ayez pas bien traité.

Pour l’intérêt que vous prenez en ma personne, en voulant savoir de quel régime j’ai usé[3] pour me faire deux mentons des peaux de votre connoissance, et afin, dites-vous, que M. de Grignan remplisse les siennes avec ce remède, je vous dirai que j’y ai trouvé des facilités qu’il ne rencontreroit pas comme moi. Il n’est pas

  1. 10. Cette lettre ne se trouve pas dans la Correspondance de Bussy.
  2. 11. Le mot intime a été biffé et remplacé dans l’interligne, d’une autre main que celle de Bussy, par les mots : « (notre) proche parent et notre bon (ami). »
  3. 12. Dans le manuscrit de la Bibliothèque impériale : « je me suis servi ; » à la ligne suivante : « et afin, dites-vous, de faire que M. de Grignan, etc. » Six lignes après, les mots « et lui aussi » manquent dans ce manuscrit.