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1684

947. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ AU COMTE DE BUSSY RABUTIN[1].

Aux Rochers, ce dernier jour de l’an 1684.

Votre lettre m’est venue trouver jusques ici, mon cher cousin. Elle m’a appris la mort de ma pauvre tante de Toulongeon[2]. En vérité, j’ai senti la force du sang ; j’ai regardé en elle le sang de sa bienheureuse mère et de son brave et illustre frère. Il n’y a plus que moi de cette branche. Mais pour vous, qui avez à part votre mérite et vos belles actions, et qui seriez le sujet des regrets de ceux qui vivroient assez longtemps pour vous perdre, je suis persuadée qu’à quatre-vingt-six ans le régime que vous observerez et le choix des bonnes viandes vous feront un regain de vie pour vingt ans. Ainsi, mon cher cousin, je vous laisserai en ce monde pour y soutenir mon nom.

Je reviens à cette pauvre tante. Elle a donc poussé sa passion dominante[3] jusqu’à la fin. Vous me peignez fort plaisamment les manières dont elle s’est ménagée, pour éviter de s’engager, au cas qu’elle revînt au monde, et pour empêcher Monsieur d’Autun d’aller chez elle ; cela m’a fait souvenir du soin qu’elle prit de me venir voir à Monthelon, de peur que je n’allasse chez elle[4] ; cela s’appelle de la ladrerie en langage commun. Ce que vous

  1. Lettre 947. — 1. Cette lettre n’est que dans le manuscrit de la Bibliothèque impériale. Voyez ci-dessus, p. 252, note 2.
  2. 2. Voyez la Notice, p. 14.
  3. 3. L’avarice. — Tout cet alinéa a été biffé, et particulièrement, cinq lignes plus loin, les mots : « cela s’appelle de la ladrerie en langage commun. » Immédiatement avant, l’édition de 1818 donne Montjeu, au lieu de Monthelon. L’alinéa suivant, qui manque dans cette édition, ainsi que dans la première (1697), avait été aussi biffé par Bussy, mais il a été rétabli en interligne par une autre main que la sienne.
  4. 4. Voyez la lettre du 22 juillet 1672, tome III, p. 153.