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1684 conclusion du mariage de mon fils, mais cela même me servira d’excuse : demandez à notre ami Corbinelli ce que c’est que d’avoir affaire avec des bas Bretons ; il n’y a point de tête qui n’en soit renversée, et l’on ne peut pas songer à M. de Moulceau quand on fait un contrat dans la généralité de Ploermel : cette dernière pensée chasse absolument l’autre ; votre souvenir ne peut pas demeurer dans une mémoire chargée de tous les incidents qui ont accompagné notre mariage, jusqu’au jour de la bénédiction nuptiale. Elle fut donnée le 8e de l’autre mois, et dès ce moment je me mis à respirer et à songer qu’il y avoit au monde l’antipode de notre beau-père, qui s’appeloit M. de Moulceau. Cette pensée m’a redonné la vie, et votre lettre est venue tout à propos, pour répondre à ce qu’on pensoit de vous. Notre Corbinelli a eu part aussi à mon tourbillon, car le pauvre homme n’en est pas à couvert ; il a beau se parer de sa philosophie, il faut qu’il écoute mes détails cruels, qu’il entre dans mes colères, qu’il me dise que j’ai raison pour m’empêcher de la perdre tout à fait ; enfin il a été dans cette occasion, comme dans plusieurs autres, le médecin de mon âme. Il a donc cette excuse, sans compter celle d’être un jeune avocat, qui veut se signaler par la perte de trois ou quatre procès de ses meilleurs amis, dont il a été le conseil. Ce pauvre M. de Housset[1] en sait des nouvelles, en attendant mon cousin de Bussy. Je vous rendrai compte de ce dernier ; car si par hasard il le gagnoit, il seroit l’homme du monde le plus riche, puisqu’il auroit l’habileté de faire voir qu’un mariage qu’on croyoit bon, n’est qu’une pure imagination, et n’a jamais été.

  1. Lettre 925. — 1. Il y avait un Claude du Housset ou du Houssay, chancelier de Monsieur, qui mourut fort vieux en septembre 1685 ; mais ce nom est bien commun.