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1683 qui m’a conservé dans quelques occasions assez chaudes[1], m’a conservé aussi dans celle que je viens d’essuyer, qui étoit en vérité toute des plus froides[2]. J’ai reçu vos deux lettres ; vous voulez donc causer encore à cœur ouvert ? Eh bien causons, ma très-chère Madame : il y a encore quelque chose à sortir ; allons, soulageons-nous. Premièrement, vous vous trompez toujours quand vous prenez ce que dit M. de Mauron, comme si je le disois moi-même. Je vous mande que M. de Mauron dit que ma sœur le méprise, et qu’il semble que cette alliance lui fasse tort ; moi, je vous le mande pour vous faire voir qu’il faut que ma sœur écrive ; vous me répondez pour me montrer que c’est le procédé de M. de Mauron qui est plein d’incivilité pour vous. Eh ! vraiment je le sais bien : je le trouve tout comme vous ; ce n’est pas moi qu’il faut persuader ; mais ce n’est pas moi aussi qu’il en faut punir, et c’est ce que faisoit ma sœur avant qu’elle eût écrit. Elle est mal contente de M. de Mauron ; elle ne sait pas bonnement pourquoi ; et là-dessus elle ne veut point écrire deux lettres qui me sont très-nécessaires, et qui me causent des désagréments infinis dans une famille où je suis trop heureux d’entrer. Je trouve ce raisonnement un peu gauche, n’en déplaise à la logique de M. Descartes. Remettez-vous donc dans l’esprit, ma très-chère Madame, que je ne vous ai jamais parlé de moi-même, quand je vous ai parlé des mépris dont M. de Mauron se plaignoit. Je sens son procédé pour vous et pour moi comme il le faut sentir ; mais

  1. 2. Particulièrement à Senef, à la bataille de Saint-Denis et dans la campagne de 1677. Voyez la lettre du 15 août 1674, tome III, p. 410, 411 et note 2, et celle du 23 août 1678, tome V, p. 471 ; voyez aussi tome V, p. 191, note 6.
  2. 3. Il avoit fait un voyage en basse Bretagne pendant un hiver très-rigoureux. (Note du Mercure, d’où cette lettre est tirée.)