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1682 prendre qu’ayant eu pendant six mois un aussi bon maître que M. de Vardes, ils y auront plus profité qu’ils n’avoient fait pendant toute leur vie. Ce retour laisse un vide que notre ami remplira fort agréablement. Vous nous apprendrez le succès de cette colique d’économie dont la tendresse paternelle doit être la sage-femme. Si vous entendez cette période, à la bonne heure ; si elle vous paroît obscure, mettez-le sur le compte du pompeux galimatias que vous nous avez si bien inspiré. Le zèle de M. le chevalier de Grignan est toujours dans toute sa ferveur pour l’affaire que vous savez ; il attend les occasions de le mettre en usage ; les objections que je vous avois faites ne viennent pas de lui, et j’y avois répondu ; en un mot, il est tel que vous l’avez laissé. Il y a des gens qui perdroient beaucoup s’ils étoient sujets au changement. La santé de ma fille n’est pas de même : elle est bien mieux qu’elle n’étoit quand vous êtes parti ; son visage vous feroit souvenir de celui que vous avez vu à Grignan. M. de Grignan et ses filles et son fils, et notre bon abbé, tout cela est comme on le peut souhaiter. La dévotion de Mlle de Grignan est augmentée et augmentera encore ; car elle puise dans une source qui ne tarit jamais. Celle des amitiés de Mme de Verneuil pour moi est à peu près de cette magnificence : elle m’a paru avec ce don de persévérance que nous avons l’une pour l’autre depuis plus de trente ans. Cette liberté de parler ainsi d’une princesse, et l’antiquité de cette date, m’obligent de finir cet article : je vous dis donc adieu, Monsieur, après vous avoir supplié pourtant de ne pas tant louer le Roi sur cette dernière action que nous vous avons mandée, que vous en oubliiez toutes les autres ; célébrons toujours son grand nom sur la terre et sur l’onde[1] et l’admirons dans

  1. 8. C’est sans doute une allusion au vers 357 de Cinna.