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1680 est possible que M. de la Trousse ne nous donne point quelque porte un peu moins inhumaine pour sortir d’un labyrinthe où il nous a mis. Vous pouvez penser comme cette véritable raison d’être embarrassé de sa charge augmente l’envie qu’il avoit[1] de s’en défaire quand rien ne l’obligeoit à y penser.

La Providence veut donc l’ordre ; si l’ordre n’est autre chose que la volonté de Dieu, quasi tout se fait donc contre sa volonté[2]. Toutes les persécutions que je vois contre saint Athanase et les orthodoxes, la prospérité des tyrans[3], tout cela est contre l’ordre, et par conséquent contre la volonté de Dieu ; mais n’en déplaise à votre P. Malebranche[4], ne feroit-il pas aussi bien de s’en tenir à ce que dit saint Augustin, que Dieu permet toutes ces choses, parce qu’il en tire sa gloire par des voies qui nous sont inconnues ? Il ne connoît[5] de règle ni d’ordre que la volonté de Dieu ; et si nous ne suivons cette doctrine, nous aurons le déplaisir de voir que rien dans le monde n’étant quasi dans l’ordre, tout s’y passera contre la volonté de celui qui l’a fait : cela me paroît bien cruel.

Mais écoutez, ma fille, une chose qui est tout à fait dans l’ordre : c’est que j’ai donc fait faire deux petites brandebourgs[6] pour la pluie, l’une au bout de la

  1. 18. « Que mon fils avoit. » (Édition de 1754.)
  2. 19. « Si la Providence vent l’ordre, et si l’ordre n’est autre chose que la volonté de Dieu, il y a donc bien des choses qui se font contre sa volonté. » (Ibidem.)
  3. 20. « Contre saint Athanase et contre les orthodoxes, les prospérités des tyrans. » (Ibidem.)
  4. 21. Le P. Malebranche dit que tout ce qui se fait dans la nature, c’est par l’amour de l’ordre. (Note de Perrin.)
  5. 22. « Saint Augustin ne connoît. » (Édition de 1754.)
  6. 23. C’est ainsi que Mme de Sévigné appelle ses petites construc-