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1680 c’est une belle charité que d’en tirer une créature. Elle m’a écrit deux fois d’un style tout naturel, et même assez gai, sans me rien dire de tout son chagrin. Cela me persuade qu’elle n’a pas dessein de m’en faire ses plaintes, peut-être parce qu’elle espère que cela finira comme l’autre fois, et que je me moquerois d’elle, car je ne sais si elle sent son tort. On est quelquefois si aveuglé que l’on ne voit goutte ; voilà une vérité[1] bien surprenante, que les aveugles ne voient pas clair ; cependant vous m’entendez. Ce que vous me disiez l’autre jour de l’humeur et sur la mémoire étoit parfaitement bon ; je ne vous en parlai point assez, mais il est vrai[2] que ce sont deux choses que l’on n’honore point assez.

J’ai dessein[3] de vous convaincre d’être hérétique : non, ma fille, quand vous en devriez désespérer[4], la mort de Jésus-Christ ne suffit point sans le baptême : il le faut d’eau ou de sang[5] ; c’est à cette condition qu’il a mis l’utilité que nous en devons recevoir[6] : rien du vieil homme n’entrera dans le ciel, que par la régénération de Jésus-Christ. Si vous me demandez pourquoi, je vous dirai, comme saint Augustin, que je n’en sais rien ; et

ainsi abrégé dans les deux éditions de Perrin : « c’est une belle charité que d’en tirer une créature qui ne sent peut-être pas son tort. On est quelquefois, etc. »

  1. 7. « C’est une vérité. » (Édition de 1754.)
  2. 8. « Ce que vous disiez l’autre jour sur l’humeur et sur la mémoire étoit parfaitement bon ; il est vrai, etc. » (Éditions de 1737 et de 1754.)
  3. 9. « J’ai dessein aussi, etc. » (Ibidem.)
  4. 10. « Quand vous devriez en enrager. » (Ibidem.)
  5. 11. « D’eau, d’esprit ou dé sang. » (Édition de 1737.) — « D’eau, de desir ou de sang. » (Édition de 1754.) — Voyez la première Épître de saint Jean, chapitre v, versets 6-9.
  6. 12. « Que nous en devons retirer. » (Édition de 1754.)