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1680 elle verse en chemin, une glace lui coupe son corps de jupe, et entre dans son corps si avant, qu’elle s’en meurt. On me mandait de Paris qu’elle étoit désespérée, et des chirurgiens, et de mourir si jeune. Voilà une belle aventure ; vous la savez, ma bonne ; c’est[1] une folie de vous l’avoir mandée ; mais c’est que cette histoire me fait[2] une grande trace dans le cerveau.

On disoit que Mme de Nevers en faisoit une dans la première tête du monde[3], et qu’une autre petite tête en étoit renversée[4] ; mais je ne trouve point que cela ait eu de suite. Le Roi a communié à la Pentecôte[5]. Le crédit de Mme de Fontanges est brillant et solide ; mais que pourroit-on penser sur cette bonne amitié ?

J’ai reçu une lettre de M. de Pompone du milieu de son oisiveté, dont je me trouve plus honorée que quand il étoit à Saint-Germain ; c’est là où il est redevenu parfait comme à Fresnes : ah ! qu’il fait un bon usage de sa disgrâce, et qu’il est en bonne compagnie ! Il est vrai que

  1. 27. « Si vous la savez, c’est, etc. » (Édition de 1754.)
  2. 28. « Mais c’est que cela me fait. » (Édition de 1737.) — « Mais c’est qu’elle me fait. » (Édition de 1754.)
  3. 29. Mme de Montespan, voyant le Roi prés de lui échapper, tâcha de lui inspirer du goût pour Mme de Nevers, sa nièce. « Mais, dit Mme de Caylus, il ne donna pas dans le piège, soit qu’on s’y prit d’une manière trop grossière, capable de le révolter, ou que sa beauté n’eût pas fait sur lui l’effet qu’elle produisoit sur tous ceux qui la regardoient. » (Souvenirs, tome LXVI, p. 403.)
  4. 30. Dans l’édition de 1754 : « et qu’une autre tête plus petite… » — C’est encore Mme de Caylus qui sert ici d’interprète à Mme de Sévigné. On voit dans ses Souvenirs que Monsieur le Duc, devenu prince de Condé, était fort amoureux de Mme de Nevers, et elle raconte que, pour empêcher son mari de l’emmener à Rome, le prince donna à Monsieur le Dauphin une fête magnifique, dont M. de Nevers fit les paroles ; il était sans doute loin de penser que c’était pour lui que la fête se donnait. (Note de l’édition de 1818.) Voyez les Souvenirs, tome LXVI, p. 403 et 404.
  5. 31. Voyez la Gazette du 15 juin, p. 291.