Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/455

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


que rien le touche plus joliment[1] ; il n’est que trop sage et trop posé : il faut le secouer par des plaintes injustes.


1680

818. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

Aux Rochers, ce mercredi 12e juin.

Comment, ma fille ? j’ai donc fait un sermon sans y penser ? J’en suis aussi étonnée que M. le comte de Soissons, quand on lui découvrit qu’il faisoit de la prose[2]. Il est vrai que je me sens assez portée à faire honneur à la grâce de Jésus-Christ. Je ne dis point comme la Reine mère dans l’excès de son zèle contre ces misérables jansénistes : « Ah ! fi, fi de la grâce ! » Je dis tout le contraire, et je trouve que j’ai de bons garants. Puisque vous m’avez dit vos visions sur la fortune[3] de vos beaux-frères, je vous dirai sincèrement que j’avois peur que l’air d’une maison[4] où l’on parle quelquefois de cette divine grâce, ne fît tort à l’abbé de Grignan ; Dieu merci, je n’ai point fait de mal, non plus que vous ; et si je me tais maintenant, comme je le dois et le veux faire, ce

  1. 59. « Que rien le touche plus joliment que cet endroit. » (Édition de 1754.)
  2. Lettre 818 (revue en partie sur une ancienne copie). — 1. Il paraît que Molière emprunta d’Eugène-Maurice de Savoie, comte de Soissons, ce trait de la vie scène du IIe acte du Bourgeois gentilhomme. Le comte vivait encore quand la pièce fut représentée en 1670 ; il ne mourut qu’en 1673. (Note de l’édition de 1818)
  3. 2. « Sur le sujet de la fortune. » (Édition de 1754.) — Cette phrase et toute la fin de l’alinéa manquent dans le texte de 1737.
  4. 3. Sans doute la maison d’Arnauld de Pompone. — Dans notre manuscrit, par une erreur du copiste : « l’air d’une maison que l’on parle, etc. »