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1680 pénétré de la raison et de vos devoirs[1] ? Et vous vous moquez de moi[2]  : vous savez bien ce que vous êtes au-dessus des autres ; vous avez de la tête, du jugement, du discernement, de l’incertitude à force de lumières, de l’habileté, de l’insinuation, du dessein quand vous voulez, de la prudence, de la conduite, de la fermeté, de la présence d’esprit, de l’éloquence, et le don de vous faire aimer quand il vous plaît, et quelquefois plus et beaucoup plus que vous ne voudriez : le papier ne manque pas, non plus que la matière ; mais pour tout dire en un mot, vous avez du fond pour être tout ce que vous voudrez. Il y a bien des gens à qui l’étoffe manque, qui voient à tout moment le bout de leur esprit ; ma chère enfant, ne vous plaignez pas.

Je voudrois[3] qu’on vous eût apporté bien de l’argent de cette terre où l’on avoit déjà oublié M. de Grignan et repris l’indépendance. Malgré la belle réputation de la Bretagne, tout y est misérable, nos terres rabaissent.

Je reçois une lettre de Mme de Vins : elle me dit de vos nouvelles ; vous êtes notre lien[4] ; elle est abîmée dans ses procès, et ne regrette cette sujétion que parce que cela l’empêche d’être à Pompone, ne regrettant nulle autre chose dans le monde[5]. Elle est d’une sagesse qui me touche et que j’admire ; elle me paroît triste, et

  1. 24. « Et plus pénétré que vous de la raison et de ses devoirs ? » (Édition de 1737.) — « Et plus pénétré de la raison et de ses devoirs ? » (Édition de 1754.)
  2. 25. Ce membre de phrase n’est pas dans l’impression de 1737, qui continue ainsi : « Mais vous savez bien, etc. »
  3. 26. Ce petit alinéa n’est que dans le manuscrit.
  4. 27. Dans le texte de 1737, sans doute par une faute d’impression : « notre bien. »
  5. 28. Ce dernier membre de phrase « ne regrettant, etc., » se trouve seulement dans notre ancienne copie.