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1680 propre aux vocations un peu équivoques : on accorde la gloire et les plaisirs. Vous êtes plus à portée de juger de cela que personne[1]. L’abbaye pourroit être si petite, le pays si détestable, que vous feriez mal de l’y mettre ; mais il me semble à vue de pays[2] qu’elle seroit mille fois mieux là qu’à Aix, où vous n’irez plus[3] :

C’est pour Jupiter qu’elle change ;
Il est permis de changer[4].

C’est une enfant entièrement perdue, que vous ne reverrez plus[5], puisque M. de Vendôme sera gouverneur : elle se désespérera. On a mille consolations dans une abbaye ; on peut aller avec sa tante voir quelquefois la maison paternelle ; on va aux eaux, on est la nièce de Madame ; enfin il me semble que cela vaut mieux. Mais qu’en dit Monsieur l’Archevêque ? Son avis vous doit décider.

Le vôtre me paroît bien mauvais sur tout ce que vous dites de vous : à qui en avez-vous, ma bonne, de dire pis que pendre à votre esprit, si beau et si bon[6] ? Y a-t-il[7] quelqu’un au monde qui soit plus éclairé et plus

  1. 17. « De juger sur cela que personne du monde. » (Édition de 1754.)
  2. 18. « Mais, si cela n’est pas, il me semble en gros, etc. » (Ibidem.)
  3. 19. Mme de Sévigné se flattoit que M. le duc de Vendôme, qui étoit gouverneur de Provence, y commanderoit à l’avenir, et que M. et Mme de Grignan viendroient s’établir à Paris et à la cour. (Note de Perrin.)
  4. 20.Quand c’est pour Jupiter qu’on change,
    Il n’est pas honteux de changer,

    dit Mercure dans l’Isis de Quinault (acte I, scène v). Ces deux vers ne se lisent que dans notre manuscrit.

  5. 21. « Et que vous ne verrez plus. » (Édition de 1754.)
  6. 22. « À qui en avez-vous donc, ma fille, de dire pis que pendre de votre esprit, si beau et si bon ? » (Édition de 1737.) — « A qui en avez-vous de parler si mal de votre esprit, qui est si beau et si bon ? » (Édition de 1754.)
  7. 23. « Y en a-t-il. » (Édition de 1754.)