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1680 quasi déserte[1], me vint voir. Nous partîmes à dix heures, et tout le monde me disant que j’avois trop de temps, que les chemins étoient comme dans cette chambre, car c’est toujours la comparaison ; ils étoient si bien comme dans cette chambre, que nous n’arrivâmes ici qu’après douze heures du soir[2], toujours dans l’eau, et de Vitré ici, où j’ai été mille fois, nous ne les reconnoissions pas : tous les pavés sont devenus impraticables, les bourbiers sont enfoncés, les haut et bas, plus haut et bas qu’ils n’étoient ; enfin, voyant que nous ne voyions plus rien, et qu’il falloit tâter le chemin, nous envoyâmes[3] demander du secours à Pilois ; il vient avec une douzaine de gars ; les uns nous tenoient, les autres nous éclairoient avec plusieurs bouchons de paille, et tous parloient si extrêmement breton, que nous pâmions de rire. Enfin, avec cette illumination, nous arrivâmes ici, nos chevaux rebutés, nos gens tout trempés, mon carrosse rompu, et nous assez fatigués ; nous mangeâmes peu ; nous avons beaucoup dormi ; et ce matin nous nous sommes trouvés aux Rochers, mais encore tout gauches et mal rangés. J’avois envoyé Rencontre[4]afin de ne pas retrouver ma poussière depuis quatre ans ; nous sommes au moins proprement.

Nous avons été régalés de bien des gens de Vitré, des Récollets, Mlle du Plessis en larmes de sa pauvre mère, et je n’ai senti de joie[5] que lorsque tout s’en est allé à six heures, et que je suis demeurée un peu de temps dans

  1. 11. Ce petit membre de phrase est seulement dans l’édition de 1737.
  2. 12. « Qu’après minuit. » (Édition de 1754.)
  3. 13. « Nous envoyons. » (Ibidem.)
  4. 14. Voyez plus haut, p. 118.
  5. 15. Dans l’impression de 1737, on lit seulement : « Nous avons été régalés de bien des gens de Vitré, et je n’ai senti de joie, etc. »